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Andre Cornelis

Bag om Andre Cornelis

Extrait chapitre I Quand j'étais enfant, je me confessais. Combien j'ai souhaité de fois être encore celui qui entrait dans la chapelle vers les cinq heures du soir, cette vide et froide chapelle du collège avec ses murs crépis à la chaux, avec ses bancs numérotés, son maigre harmonium, sa criarde Sainte Famille, sa voûte peinte en bleu et semée d'étoiles. Un maître nous amenait, dix par dix. Quand arrivait mon tour de m'agenouiller dans l'une des deux cases réservées aux pénitents sur chaque côté de l'étroite guérite en bois, mon coeur battait à se rompre. J'entendais, sans bien distinguer les paroles, la voix de l'aumônier en train de questionner le camarade à la confession duquel succèderait la mienne. Ce chuchotement me poignait, comme aussi le demi-jour et le silence de la chapelle. Ces sensations, jointes à la honte de mes péchés à dire, me rendaient presque insupportable le bruit de la planchette que tirait le prêtre. À travers la grille, je voyais son regard aigu, son profil si arrêté, quoique le visage fût gras et congestionné. Quelle minute d'angoisse à en mourir, mais aussi quelle douceur ensuite ! Quelle impression de suprême liberté, d'intime allégeance, de faute effacée, et comme d'une belle page blanche offerte à ma ferveur pour la bien remplir ! Je suis trop étranger aujourd'hui à cette foi religieuse de mes premières années pour m'imaginer qu'il y eût là un phénomène d'ordre surnaturel. Où gisait donc le principe de délivrance qui me rajeunissait toute l'âme ? Uniquement dans le fait d'avoir dit mes fautes, jeté au dehors ce poids de la conscience qui nous étouffe. C'était le coup de bistouri qui vide l'abcès. Hélas ! Je n'ai pas de confessionnal où m'agenouiller, plus de prière à murmurer, plus de Dieu en qui espérer ! Il faut que je me débarrasse pourtant de ces intolérables souvenirs. La tragédie intime que j'ai subie pèse trop lourdement sur ma mémoire. Et pas un ami à qui parler, pas un écho où jeter ma plainte. Certaines phrases ne peuvent pas être prononcées, puisqu'elles ne doivent pas avoir été entendues... C'est alors que j'ai conçu l'idée, afin de tromper ma douleur, de me confesser ici, pour moi seul, sur un cahier de papier blanc, - comme je ferais au prêtre. Je jetterai là tout le détail de cette affreuse histoire, morceau par morceau, comme le souvenir viendra. Une fois cette confession finie, je verrai bien si l'angoisse est finie aussi. Ah ! diminuée seulement !... Qu'elle soit moindre ! Que je puisse aller et venir, avoir ma part de la jeunesse et de la vie ! J'ai tant souffert et depuis si longtemps, et je l'aime, cette vie, malgré ces souffrances. Un verre de cette noire drogue, de ce laudanum que j'ai dans un flacon, pour les nuits où je ne dors pas, et cette lente torture de mes remords cesserait du coup.

Vis mere
  • Sprog:
  • Fransk
  • ISBN:
  • 9781516835935
  • Indbinding:
  • Paperback
  • Sideantal:
  • 138
  • Udgivet:
  • 11. august 2015
  • Størrelse:
  • 152x229x8 mm.
  • Vægt:
  • 195 g.
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Beskrivelse af Andre Cornelis

Extrait chapitre I Quand j'étais enfant, je me confessais. Combien j'ai souhaité de fois être encore celui qui entrait dans la chapelle vers les cinq heures du soir, cette vide et froide chapelle du collège avec ses murs crépis à la chaux, avec ses bancs numérotés, son maigre harmonium, sa criarde Sainte Famille, sa voûte peinte en bleu et semée d'étoiles. Un maître nous amenait, dix par dix. Quand arrivait mon tour de m'agenouiller dans l'une des deux cases réservées aux pénitents sur chaque côté de l'étroite guérite en bois, mon coeur battait à se rompre. J'entendais, sans bien distinguer les paroles, la voix de l'aumônier en train de questionner le camarade à la confession duquel succèderait la mienne. Ce chuchotement me poignait, comme aussi le demi-jour et le silence de la chapelle. Ces sensations, jointes à la honte de mes péchés à dire, me rendaient presque insupportable le bruit de la planchette que tirait le prêtre. À travers la grille, je voyais son regard aigu, son profil si arrêté, quoique le visage fût gras et congestionné. Quelle minute d'angoisse à en mourir, mais aussi quelle douceur ensuite ! Quelle impression de suprême liberté, d'intime allégeance, de faute effacée, et comme d'une belle page blanche offerte à ma ferveur pour la bien remplir ! Je suis trop étranger aujourd'hui à cette foi religieuse de mes premières années pour m'imaginer qu'il y eût là un phénomène d'ordre surnaturel. Où gisait donc le principe de délivrance qui me rajeunissait toute l'âme ? Uniquement dans le fait d'avoir dit mes fautes, jeté au dehors ce poids de la conscience qui nous étouffe. C'était le coup de bistouri qui vide l'abcès. Hélas ! Je n'ai pas de confessionnal où m'agenouiller, plus de prière à murmurer, plus de Dieu en qui espérer ! Il faut que je me débarrasse pourtant de ces intolérables souvenirs. La tragédie intime que j'ai subie pèse trop lourdement sur ma mémoire. Et pas un ami à qui parler, pas un écho où jeter ma plainte. Certaines phrases ne peuvent pas être prononcées, puisqu'elles ne doivent pas avoir été entendues... C'est alors que j'ai conçu l'idée, afin de tromper ma douleur, de me confesser ici, pour moi seul, sur un cahier de papier blanc, - comme je ferais au prêtre. Je jetterai là tout le détail de cette affreuse histoire, morceau par morceau, comme le souvenir viendra. Une fois cette confession finie, je verrai bien si l'angoisse est finie aussi. Ah ! diminuée seulement !... Qu'elle soit moindre ! Que je puisse aller et venir, avoir ma part de la jeunesse et de la vie ! J'ai tant souffert et depuis si longtemps, et je l'aime, cette vie, malgré ces souffrances. Un verre de cette noire drogue, de ce laudanum que j'ai dans un flacon, pour les nuits où je ne dors pas, et cette lente torture de mes remords cesserait du coup.

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