Bag om La Philosophie moderne depuis Ramus jusqu'à Hegel
Il est assez de mode en ce moment de décrier l'histoire de la philosophie: c'est, dit-on, une étude épuisée. Platon et Aristote, Descartes et Leibnitz nous ont dit tous leurs secrets; il est temps que ces illustres morts reposent en paix dans leurs tombeaux et que les vivants prennent la parole. Voilà un fier langage, voilà, qui mieux est, un généreux appel et qui mérite d'être entendu. Oui, certes, l'érudition et la critique, la plus vaste érudition, la plus fine et la plus profonde critique, ne suffisent point aux besoins de l'esprit humain. Il faut conclure, il faut affirmer, il faut aboutir à des théories et à des systèmes. Tout cela est incontestable, et quant à nous, loin de nous plaindre de la nouvelle disposition des esprits et de ces aspirations dogmatiques qui éclatent de toutes parts, nous en éprouvons une véritable joie, y voyant un symptôme des plus heureux, un signe de vitalité intellectuelle et morale. Quoi donc ! pour mieux aimer la philosophie, serons-nous obligés d'en dédaigner l'histoire ? - Non, dira-t-on, cette histoire a son prix; mais, grâce à Dieu, elle n'est plus à faire, elle est faite. - Il y a ici une grande illusion. Que l'histoire de la philosophie ait été inaugurée avec éclat depuis quarante années, et que cette oeuvre immense, poursuivie par un heureux concours d'esprits ingénieux et puissants, soit aujourd'hui fort avancée, je n'en disconviens pas, et j'y vois un des titres d'honneur de notre siècle; mais que tout soit fini, voilà ce que je conteste très-positivement...
Vis mere