Bag om La Sagesse qui rit
Le livre que je tente d'écrire, le voici devant moi, tout écrit. Je le commençai vers le commencement du siècle. Bientôt les difficultés entrelacées m'arrêtèrent. Mille obstacles railleurs conseillaient d'abandonner l'entreprise. Je ne les écoutai point. Je n'eus pas non plus la vaillance de multiplier sans repos tant d'assauts pénibles. Malgré insatisfactions et doutes, je m'imposai d'aller, en négligeant les points trop abrupts, jusqu'au bout du voyage. Je reviendrais ensuite, à loisir, étudier tantôt l'une, tantôt l'autre des questions réservées. J'envahissais le plat pays et de petites armées d'inquiétudes assiégeaient les places fortes. Quand je relus les pages entassées, trop de conquêtes me semblèrent apparentes; trop de citadelles, imprenables. Je me détournai vers des ouvrages plus souriants. Cependant je n'oubliai jamais ce livre. Une semaine a-t-elle passé sans que j'aie noté quelque solution de détail, quelque problème nouveau, quelque aspect inaperçu jusque-là ?... Parmi ces notes tâtonnantes, je retrouve, qui essaient de les ordonner, onze plans d'époques différentes et inégalement développés. De 1909 à 1925, j'ai employé chaque mois de septembre à errer parmi ces ruines et ces constructions interrompues, relevant ici un pan de mur, en abattant un autre là. Travail préliminaire et incertain, vas-tu me soutenir ou me nuire ? Bégaiements venus de moi et qui parfois me semblez si étrangers, êtes-vous lumières pauvres mais durables que le rapprochement enrichira et qui m'aiderez à voir ma pensée ? êtes-vous ces éclairs dont la brusquerie aveugle et laisse derrière elle un horizon plus obscur ?...
Vis mere