Bag om Le château de La Belle-au-bois-dormant
Combien est singulier et difficilement explicable le charme gardé par des lieux qu'on a connus à peine, au début lointain de la vie, étant tout petit enfant,¿ mais où les ancêtres, depuis des époques imprécises, avaient vécu et s'étaient succédé!
La maison dont je vais parler,¿la maison «de l'île», comme on l'appelait dans ma famille autrefois,¿la maison de mes ancêtres huguenots avait été vendue à des étrangers après la mort de mon arrière-grand'mère, Jeanne Renaudin, il y a plus de soixante ans. Quand je vins au monde, elle appartenait à un pasteur, ami de ma famille, qui n'y changeait aucune chose, y respectait nos souvenirs et n'y troublait point le sommeil de nos morts, couchés au temps des persécutions religieuses dans la terre du jardin. Pendant les premières années de ma vie ma mère, mes tantes et grand'tantes, qui avaient passé dans cette maison une partie de leur jeunesse, y venaient souvent en pèlerinage; on m'y conduisait aussi et il semblait que, malgré les actes notariés, elle n'eût pas cessé de nous appartenir, par quelque lien secret, insaisissable pour les hommes de loi.
Ensuite, nous nous étions peu à peu déshabitués d'aller dans l'île,¿où, d'ailleurs, les dernières de nos vieilles tantes étaient mortes,¿et je n'avais plus revu l'antique demeure.
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