Bag om Traité sur la tolérance
LE meurtre de Calas, commis dans Toulouse avec le glaive de la Justice, le me
Mars , est un des plus singuliers événements qui méritent l'attention de notre
âge & de la postérité. On oublie bientôt cette foule de morts qui a péri dans des
batailles sans nombre, non-seulement parce que c'est la fatalité inévitable de la
guerre, mais parce que ceux qui meurent par le sort des armes, pouvaient
aussi donner la mort à leurs ennemis, & n'ont point péri sans se défendre. Là
où le danger & l'avantage sont égaux, l'étonnement cesse, & la pitié même
s'affaiblit: mais si un Pere de famille innocent est livré aux mains de l'erreur,
ou de la passion, ou du fanatisme; si l'accusé n'a de défense que sa vertu, si les
arbitres de sa vie n'ont à risquer en l'égorgeant que de se tromper, s'ils peuvent
tuer impunément par un arrêt; alors le cri public s'éleve, chacun craint pour
soi-même; on voit que personne n'est en sûreté de sa vie devant un Tribunal
érigé pour veiller sur la vie des Citoyens, & toutes les voix se réunissent pour
demander vengeance.
Vis mere