Bag om VÉRITÉ
En octobre, ce fut avec une sérénité joyeuse que Marc alla
reprendre, à Jonville, son ancien poste si modeste d¿instituteur
primaire. Un grand calme s¿était fait en lui, un courage et un espoir
nouveaux venaient de succéder à la désespérance lasse, dont l¿avait
accablé le monstrueux arrêt de Rozan.
Jamais on ne réalise tout l¿idéal, et il se reprochait presque
d¿avoir compté sur un triomphe d¿apothéose. Le train humain ne va
pas de la sorte par bonds superbes et par glorieux coups de théâtre.
C¿était la chimère, croire que la justice allait être acclamée par les
millions de bouches d¿un peuple, s¿imaginer le retour de l¿innocent
au milieu d¿une grande fête nationale, faisant du pays entier une
nation de frères. Chaque progrès, le plus petit, le plus légitime, a dû
être conquis par des siècles de lutte. Chaque pas en avant de
l¿humanité a demandé des torrents de sang et de larmes, des
hécatombes de victimes, se sacrifiant pour le bonheur des
générations futures. Et, dans cette éternelle bataille contre les forces
mauvaises, il était donc déraisonnable d¿attendre une victoire
décisive, un de ces coups suprêmes qui réalisent toute l¿espérance,
tout le rêve d¿une humanité fraternelle et juste.
Vis mere